Sept jours...








      Sept jours, cela fait sept jours que c’est arrivé. On s’y attend, on s’y prépare, cela n’arrive pas qu’aux autres ! Cela, c’est la maladie qui bouleverse tout. Sept jours d’errances entre l’hôpital et la maison. L’incertitude, de toute façon rien ne sera plus comme avant. Les autres, on n’en veut pas, le malheur, c’est confidentiel. Vivre reclus, puisque tout le reste fait mal, même le printemps est une offense. 
  On prévient les proches, les amis. Litanies répétitives des comptes rendus, agacements. Manger à la hâte, debout dans la cuisine, l’œil rivé sur l’horloge. La seule chose qui importe c’est d’arriver à temps pour les visites aux soins intensifs, une demi-heure, deux fois par jour, tout est concentré autour de ces instants, instants suspendus, celui de la confrontation avec l’être aimé, l’être blessé, méconnaissable. L’homme avec qui on partage tout, mais que cette épreuve éloigne, puisque la maladie abolit la fusion, on souffre toujours seul.
   Il est là, gisant, dans une lumière froide, des tuyaux reliant le corps aux écrans et appareils tintinnabulants, le visage creusé, les yeux cernés, un regard ahuri que l’on ne reconnaît pas. Au début, les larmes coulent, irrépressibles. Le contre coup, d’après une infirmière passant par là. Elles sont nombreuses à courir d’une chambre à l’autre, peu enclines à la commisération. Une demi-heure, ça passe comme rien, juste le temps de quelques caresses et de se dire que notre amour est plus fort que tout. Après comme un automate, traverser les couloirs, suivre la ligne rouge vers la sortie, reprendre cette route que l’on connaît déjà par cœur, à nouveau quelques larmes dans le confinement solitaire. Des idées absurdes parcourent l’esprit en lignes rouges comme le sang qui coule avec difficulté dans le corps de l’être chéri.
   Le neuvième jour, les nouvelles sont bonnes, fin des soins intensifs, espoir, les forces vitales reprennent le dessus. Une nouvelle période s’amorce, encore une dizaine de jours dans la chambre 803…


                                                                                        Irène de Groot - 2006